mercredi 11 octobre 2017

De l'autre côté du miroir



Une aventure de Donjons & Dragons de niveau 6

Avec



Finnlay Galindan, le druide amateur de théorie magique

Ildur Main d’Airain, le ranger devenu le jouet d’une mystérieuse puissance
Tengrim Copperplate, le nain tombé sous l’emprise de la glace noire

Kri Shanu, le moine presque aussi convaincant qu’un barde

Thormund Sombracier, le sorcier hanté par son pacte infernal



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Thormund est le premier à ouvrir les yeux, réveillé par la douleur qui lui martèle l’intérieur du crâne. Au-dessus de lui de sinistres nuées noires gonflées d’éclairs violacés tourbillonnent dans le ciel. Ses doigts s’enfoncent dans une fine poussière cristalline noire et glacée alors qu’il tâtonne pour se relever. Autour de lui ses compagnons reviennent à eux les uns après les autres.

Ildur scrute aussitôt par réflexe l’étendue obscure qui les entoure. L’horizon est barré d’une mer de brumes.  Les volutes blanchâtres viennent lécher la base d’une longue ligne de croix en forme de X sur lesquelles sont attachés des dizaines de corps torturés. Ces crucifiés semblent tous sculptés dans de la glace noire vivante. Sur leur droite au loin se dresse un gigantesque pic solitaire barré d’une profonde crevasse qui évoque aussitôt au ranger le Cairn de Kelvin. De l’autre côté Finnlay discerne les contours imposants des murs d’une cité au large de laquelle passe une colonne de plusieurs dizaines de silhouettes fantomatiques. Derrière eux retentit soudain un hurlement guttural. Se retournant  en sursaut Kri contemple la forme grotesque d’un gigantesque démon d’obsidienne qui s’acharne sur les ruines fumantes d’un village niché au bord d’un lac miroitant d’éclats de ténèbres. Le gigantesque fouet de flammes glacées qu’il manie vient s’enrouler autour d’une tour qu’il renverse sans peine. Le moine a cependant le temps de reconnaitre qu’il s’agissait d’une reproduction  des ruines du fort  de Caer Konig. Le terrible visage de la créature se tourne un instant vers eux sans les voir et Thormund réfrène un frisson lorsqu’il reconnait les traits d’Errtu, le terrible balor qui le tient dans son pacte infernal. Tengrim lui non plus ne peut cacher son malaise face à l’image du démon qui l’avait pétrifié à l’entrée de la tour enfouie.

L'ombre d'Errtu

Les aventuriers décident d’aller d’abord inspecter les malheureux crucifiés. Ceux-ci sont attachés la tête en bas au-dessus  de piles d’armes et de babioles elles aussi faites de glace noire.  Leurs visages sont tous marqués par la souffrance et la peur mais ne sont pas tous du même niveau de détail, certains d’entre eux paraissant même presque stylisés. Alors que Finnlay s’interroge sur la nature de cette étrange matière qui semble constituer tout leur environnement, une voix susurre  à Thormund qu’ils sont prisonniers d’un demi-plan d’ombre fait de la substance même des illusions et que la brume irisée qui vient lécher le pied des croix est en fait le rivage de la mer astrale dans l’immensité infinie de laquelle ils flottent. Reportant leur attention sur la barrière laiteuse qui marque la fin de l’horizon ils ont la surprise d’y voir apparaitre les silhouettes de barbares enragés qui roulent dans les vagues éthérées.  Les volutes mouvantes se condensent alors pour prendre la forme d’une puissante guerrière reghed drapée d’une peau de tigre des neiges, vivante image de l’une des statues colossales qu’ils avaient vues dans le temple de l’hiver. La femme avance vers l’un des suppliciés, son regard intense les figeant sur place alors qu’elle tranche la gorge de l’homme d’un geste implacable. Un sang d’un noir insondable jaillit à gros bouillons et vient recouvrir la pile d’objets de glace noire qui se mettent aussitôt à fondre, laissant un trou béant qui continue de s’élargir et engloutit la croix et l’homme qui eux aussi se désagrègent rapidement. La femme bondit alors sur le crucifié suivant pour l’égorger provoquant le même résultat et c’est peu à peu toute la bordure du demi-plan qui s’effondre dans le vide de la mer astrale dans le tourbillon du carnage. Horrifiés les héros se précipitent vers l’abri des murailles qu’ils ont aperçues plus tôt franchissant en quelques enjambées une distance impossible qui ne les éloigne pourtant pas plus du sommet balafré qui se dresse au-dessus d’eux.

Malgré leur allure cyclopéenne les murs se révèlent être ceux de Bryn Shander. En leur sein la cité est reproduite à l’identique telle une sinistre maquette à taille réelle. Les pas des héros résonnent à travers les rues étrangement vides. Soudain Ildur repère le pas solitaire d’un homme qui traverse la ville tel une ombre absente. Les tentatives musclées de Thormund pour l’arrêter ne réussissent pas à attirer son attention et les aventuriers décident donc de le suivre jusqu’au Northlook où il s’attable aux côtés de la dizaine d’hommes d’armes plus ou moins stylisés qui s’y trouvent. Essayant de retrouver un visage familier, ils retracent leurs pas et visitent tous les endroits qu’ils connaissent. Mitann ne se trouve pas à la chapelle d’Amaunator mais l’autel est couvert de babioles extrêmement réalistes. L’entrepôt de Dunavan est vide mais la boutique de Brinna Alcott est remplie d’un groupe de conspirateurs réunis autour d’un autel caché dédié à Auril. Il n’y a nulle trace de Duvessa Shane dans la maison du conseil mais le bureau de Vaelish Gant recèle en revanche une bien étrange surprise. Le sol de la pièce fait l’effet d’un miroir brisé dans les éclats duquel  sont encore visibles les fragments d’un kaléidoscope de scènes au milieu desquels ils reconnaissent le bâton magique de Gant, le crâne couvert de tatouages d’un homme portant une luxueuse robe rouge ainsi que la lumière vacillante d’une porte dimensionnelle où s’engouffre la queue reptilienne d’un kobold albinos.

Satisfaits de leur exploration de la ville, les aventuriers décident ensuite d’aller gravir les pentes du pic pour trouver un point de vue qui leur permette d’embrasser la totalité du demi-plan d’un seul regard. Ils laissent donc derrière eux le reflet de Bryn Shander ainsi que la colonne indistincte qui d’après Kri semble avancer sur la route de Termalaine.

Leur ascension leur offre une vue plongeante sur la profonde balafre qui s’ouvre dans le flanc de la montagne. Le côté gauche est immobile et silencieux, percé de dizaines de galeries qui plongent vers les profondeurs de la terre. Le côté droit à l’inverse retentit du bruit des marteaux et son cœur rougeoie de la chaleur d’une énorme forge qui étire les ombres des habitants du lieu. Les couloirs sont en effet gardés par de puissants guerriers nains cuirassés de glace noire et mènent à une salle du trône qui surplombe la forge. Le reflet incroyablement détaillé de Baerick Hammerstone, un jeune nain que Tengrim a connu enfant, y siège face à une silhouette féminine approximative.
Baerick Hammerstone
Derrière lui se tient une figure cadavérique qui lui murmure à l’oreille tout en lui caressant le visage de ses doigts décharnés. Contrairement aux autres le mort-vivant n’est pas fait de glace mais apparait bien réel. Un sourire malsain se dessine sur ses lèvres lorsqu' il aperçoit les héros. Il se redresse en réajustant sa mise et les apostrophe d’une voix mielleuse pour leur souhaiter la bienvenue. Décontenancés les héros bredouillent quelques mots maladroits lorsqu' il leur demande leur avis sur la femme dont il fait apparaître le visage d’une caresse de son doigt squelettique sur sa joue. Elle est envoyéepar Vaelish Gant pour négocier avec les nains un accord de commercialisation de leurs objets forgés en glace noire et quoi que cette perspective semble coïncider avec les plans de la liche, le nom de Gant attise sa méfiance.  Il finit par suggérer à Baerick de se débarrasser de la femme qui est traînée au dehors par une paire de gardes de glace noire. Il propose alors aux aventuriers de se charger eux même de répandre la glace noire dans le monde et de s’en partager la domination au service du nom glorieux d’Akar Kessel. Kri est choqué de reconnaître là le nom du terrible sorcier qui avait failli conquérir le Valbise il y a un siècle.
Akar Kessel
Comprenant mieux à qui ils ont affaire, ils refusent prudemment les avances du mort vivant. Visiblement vexé, son ton se fait alors moqueur. Il taquine avec mépris Ildur qui serait d’après lui mené par le bout du nez par une mystérieuse puissance et il lui promet qu’il finira entre les crocs de celle-ci quand elle fera son retour. Il tente d’amadouer Thormund en lui proposant de le libérer de son pacte avec Errtu en en passant un avec lui en échange. Ses cajoleries restant sans effet il s’empare alors de Tengrim par l’intermédiaire de l’amulette de glace noire que le nain garde cachée sur lui depuis leur départ de Bryn Shander et lui fait acquiescer avec un sourire béat à toutes ses propositions. Kri réussit alors à détourner l’attention de Kessel en ramenant la conversation sur les crucifiés qu’ils ont vus plus tôt. Le sorcier admet qu’il s’inquiète effectivement de la colère de la nouvelle élue d’Auril qui descend du Nord à la tête de la tribu du tigre pour purifier par le sang tout le Valbise, ce qui contrarierait bien évidemment les propres plans de conquête de la liche. Profitant de la distraction Tengrim se glisse jusqu’à la forge qui brûle au fond de la pièce et il y jette son amulette qui disparait dans la fournaise en un éclair aveuglant. Un cri de frustration s’étrangle alors dans la gorge de Kessel qui congédie ces héros bien ingrats qui refusent tous ses bienfaits. Kri parvient cependant à lui arracher l’emplacement du portail de retour vers le plan matériel  en échange  de la promesse qu’ils iront lutter contre la tribu du Tigre dès leur retour.

Suivant les indications du mort-vivant les aventuriers découvrent un autre miroir identique à celui qu’ils ont traversé dans la tour de la sorcière des glaces. Il est caché au fond de l’ancien antre d’un groupe de Verbeegs, des demi-géants grotesques que Kessel avait asservi en son temps. L’endroit est maintenant occupé par un groupe d’hommes dont les héros croisent les reflets stylisés. Leur chef en revanche est reproduit de manière extraordinairement détaillée et ils surprennent sa conversation avec la forme minimaliste d’un autre homme avec qui ils ont prévu de commettre un sombre méfait le lendemain à Lonelywood. Le portail débouche dans un couloir secret non loin des deux hommes dont l’accès est gardé par un lion de falaises assoupi devant la porte. Réveillé par l’arrivée des héros, il lève une oreille curieuse dans leur direction avec de filer en un bond rejoindre ses maîtres.

Le lion des falaises


Un bruit de crécelle étouffé leur parvient de la pièce où les deux hommes tenaient leur conciliabule. Finnlay s'avance en silence pour identifier l'origine du son et tombe nez à nez avec un personnage hirsute entre les jambes duquel se glisse le lion des falaises.. En quelques sauts tout en souplesse le gros félin se faufile sous la grande bâche qui recouvre une haute cage à l'autre bout de pièce. Le cliquetis d' une serrure qui se déverrouille précède de peu la réapparition de l'animal qui rapporte prestement un lourd cadenas à son maître avant que celui ci ne claque la porte blindée de la pièce devant un Finnlay médusé par la scène. Alors que ses compagnons le rejoignent le bruit s'intensifie en même temps qu'une chaleur intense monte de la cage qui s'ouvre pour révéler l'imposante forme chitineuse d'un jeune remorhaz. 


Sans perdre un instant Kri se jette sur la bête, espérant l'étourdir d'un coup bien placé mais son assaut lui coûte bien plus cher que prévu car le simple fait de toucher de la carapace incandescente du monstre suffit à couvrir ses poings de cloques écarlates. Cela ne suffit pourtant pas à effrayer Tengrim et Thormund qui se jettent furieusement dans la mêlée, renversant l'insecte géant sous une avalanche de coups. Sa riposte n'en est pas moins dévastatrice et les deux combattants ne doivent leur salut qu'à l'intervention d'Ildur qui abat le monstre en lui transperçant les deux yeux de ses flèches. 

Quoiqu' ils aient vaincu, les héros n'en demeurent pas moins piégé dans une pièce sans issue. Tengrim a beau repérer que le plafond est une dalle de pierre amovible, tous leurs efforts pour la faire bouger restent vains.

Finnlay remarque alors qu'il doit lui être possible de rejoindre la surface en rampant sous la forme d'un lézard à travers l'étroit conduit d'évacuation de la cheminée. Malheureusement son sens de l'orientation ne vaut pas ses talents de métamorphe et il se perd dans la montagne en essayant de retrouver l'entrée dissimulée du repaire des Verbeegs.



Un long moment passe avant que ses compagnons ne se résolvent à agir de leur côté.
C'est Kri qui a l'idée toute simple d'appeler les hommes qui les ont enfermés.
Ceux ci se révèlent être des cultistes d'Auril et le moine parvient à se servir de ce qu'ils ont appris depuis qu'ils ont vaincu la sorcière des glaces pour les convaincre qu'eux aussi sont des envoyés de la déesse de l'hiver.
Son stratagème est cependant bien vite éventé lorsque les fanatiques découvrent la créature qu'ils comptaient lâcher sur Lonelywood réduite en charpie derrière les aventuriers.
Réalisant qu'il est découvert et qu'il n'a pas le talent de menteur nécessaire pour retourner la situation, le moine tombe le masque avec un soupir et se précipite sur les hommes d'arme qui lui barrent la route avant qu'ils ne puissent barricader à nouveau la porte, les balayant par surprise grâce à la puissante technique du gong du sommet.
Voyant ses sbires s'effondrer devant lui, le chef du groupe prend la fuite suivi aussitôt de l'homme hirsute et ses deux félins.
Thormund finit alors d'abattre les quelques hommes qui leur barre la route d'une boule de feu puis bondit au dessus des lions qui se sont retournés pour protéger leur maître. Tengrim et Ildur joignent leurs forces pour venir à bout du premier fauve tandis que le second file aussitôt après avoir cassé l'élan de Kri.


Thormund est le premier dehors et voit  que le chef des cultistes est remonté pour prendre un cheval. Le barbare lance une nouvelle boule de feu qui renverse la monture sur le fuyard le piégeant sous le poids de la carcasse.
L'homme sauvage dévale de son côté une pente caillouteuse dans laquelle une flèche d'Ildur le fait trébucher. Kri est sur le point de le capturer quand il se fait faucher par le deuxième lion des falaises qui s’abat sur lui de tout son poids. Mais Tengrim est juste derrière et il décapite l’animal d'un puissant coup de hache, libérant le moine dont la foulée extraordinairement déliée lui permet de rattraper l'homme. Celui-ci est terrifié et implore la clémence des héros d’une voix lourde qui trahit sa simplicité d’esprit.
Il leur révèle tout ce qu’il sait. L'autre homme qu'ils ont capturé est un marchand de Bremen nommé Davrick Fain qui l’a manipulé en lui faisant croire à son amitié. Il lui a amené des œufs de remorhaz pour que Rycher, l’homme sauvage,  les couve jusqu’à leur éclosion et apprivoise les créatures qui en sortiraient.
Il l’a ensuite convaincu que des hommes mauvais s’étaient emparé de Lonelywood et qu’il fallait y libérer la créature pour les en chasser, alors qu’il ne désirait en fait qu’y perpétrer un horrible carnage dédié à la gloire d’Auril.

Davrick quant à lui refuse de coopérer d'une quelconque manière et se retranche dans son fanatisme, restant même insensible aux tentatives d’intimidation de Thormund.

Les héros ont désormais deux prisonniers sur les bras dont ils ne savent que faire.
Tenteront ils de les ramener à Bryn Shander pour les confier à la justice?
Ou bien les abandonneront ils à leur sort pour aller immédiatement affronter la tribu du Tigre dans la toundra?
A moins qu'ils ne cherchent à en savoir plus sur la destruction de Caer Konig ou sur ce qui se passe exactement dans la vallée des nains?