Une aventure de Donjons &
Dragons de niveau 8
Avec
Balak Charon
Taâl dit le Crinti, le
demi-drow à l’entregent étonnant
Ildur Main d’Airain, Le ranger qui a encore quelques astuces à apprendre
Finnlay Galindan, Le druide qui tombe dans un
traquenard
Tengrim
Copperplate, Le nain
qui se souvient des alliances oubliées
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Les dernières semaines
de l'hiver ont passé comme un charme et l'heure de quitter le Valbise est venue
pour les héros qui l'ont arraché aux griffes du mal. La principale inquiétude
de Duvessa Shane et de ses conseillers du Zhentarim est maintenant la présence
de Talis dans leurs geôles qui peut à tout moment attirer le courroux
d'Arautathor. Les héros sont donc chargés d'escorter la wyrmspeaker en toute
discrétion vers Eauprofonde dont les antiques protections magiques barrent
l'accès à la cité à tous les dragons. Chaldos Vedriga arrange leur passage de
Fireshear vers Luskan à bord d'un des drakkars ruathens qui avait convoyé ses
troupes quelques semaines auparavant. C'est ensuite Enwyn Dawe qui se charge de
leur trouver une place sur l'un de ses navires à destination d'Eauprofonde où
l'un des associés d'Icham les attendra pour les guider à travers les méandres
de la métropole. En effet, contre toute attente, le barde a choisi de ne pas
accompagner ses compagnons vers le sud, certaines de ses affaires de la plus
haute importance nécessitant encore sa présence dans le nord. Il confie donc la
charge de poursuivre sa tâche à un homme de confiance, le fameux Balak Charon
Taâl dit le Crinti, changeur de monnaie de Waukeen dont la réputation n'est
plus à faire le long de la route du commerce.
Lorsqu'ils entrent
dans la large baie qui abrite le port d'Eauprofonde les héros sont saisis par
l'immensité de la ville qui se déploie devant eux. Derrière les centaines de
mâts qui se balancent au-dessus des quais un interminable dédale de rues pavées
grouillant d'une foule bigarrée s'étend à perte de vue. Une armada de calèches
de toutes tailles sillonne les boulevards, descendant des palais extravagants
de la noblesse du district nord vers la cohue cosmopolite du district des
marchands en passant par les imposantes flèches des temples du district du
château. La forteresse elle-même se dresse au sommet de la falaise qui protège
la rade des tempêtes hivernales et dans le ciel au-dessus des étendards
multicolores qui flottent sur ses tours les griffons de la célèbre cavalerie
aérienne d'Eauprofonde effectue une large boucle avant de plonger vers le
lointain en effleurant le heaume de l'Honorable Chevalier, l'une des colossales
statues animées qui avaient ravagé la ville pendant la magepeste.
Les aventuriers sont
accueillis dès leur descente du navire par le Crinti qui a déjà réglé toutes
les formalités d'entrée dans la ville avec le magistrat du jour. La patrouille
de miliciens qui l'accompagne les laissent ainsi passer avec leur sinistre
prisonnière sans poser de question.
Le Crinti semble fort
bien renseigné sur leur compte et s'avère un homme affable malgré son
inquiétante ascendance. Sa peau grisée et ses cheveux d'un blanc de neige lui
donnent en effet tous les airs d'un demi-drow, ce qui ne manque pas de troubler
Tengrim dont les souvenirs des elfes noirs restent traumatisants.
Une calèche privée les
attend à la sortie du port pour les emmener vers le district nord où résident
les amis d'Enwyn Dawe. Ils traversent la ville à vive allure au milieu d’une
foule innombrable qui vaque à ses occupations, indifférente au ballet des
attelages qui vont et viennent sur les pavés. L'opulence de la cité est
d'autant plus frappante que ses rues sont d'une propreté exemplaire, ce qui
tient de l'exploit au regard de la population qui s'y presse chaque jour.
La calèche bifurque
enfin vers les rues plus paisibles du luxueux district nord et s'engouffre dans
la cour intérieure d'un somptueux hôtel particulier. Avec un hochement de tête
entendu, le Crinti confie Talis à trois spadassins aux airs d'aventuriers avant
de faire signe à ses compagnons de le suivre à l'intérieur du manoir. Ils
traversent un dédale de couloirs de services qui les mène à une antichambre
richement meublée où ils ont la surprise de retrouver un visage connu. Leosin
Erlanthar, l'érudit d'Oghma qu'ils ont libéré des griffes du culte du dragon,
se lève en souriant à leur entrée et vient leur donner une chaleureuse
accolade.
Il leur présente également leurs hôtes, Lord Arthagast Ulbrinter et
sa femme, Lady Remalia Haventree.
Lord Ulbrinter |
Remi Haventree |
Tout le monde se lève
pour saluer d'une révérence la nouvelle venue mais celle-ci leur demande d'oublier
les formalités car c'est en tant qu'amis qu'elle les a ainsi rassemblés. Il
faut pourtant quelques minutes aux héros pour réussir à passer outre l'aura de
puissance qui crépite dans la voix de Laeral, mais son sourire franc et
l'amicale complicité qu'elle affiche avec Lady Haventree et son époux finissent
par détendre suffisamment l'atmosphère pour que chacun participe sans frein à
la conversation. Les exploits des aventuriers sont arrivés aux oreilles de
Laeral qui les en félicitent sincèrement. Elle espère qu'ils accepteront de les
aider à démêler les fils du complot du culte du dragon qu'ils ont mis au jour,
car contrairement à ce qu'ils peuvent croire les ménestrels ont peu de
ressources et encore moins d'agents fiables qui ont les capacités nécessaires
pour affronter les forces du culte. Leurs accusations contre Vaelish Gant ont
bien été entendues, mais il est difficile de s'en prendre à lui directement car
son père, le vieil Albrecht Gant, est un des plus proches amis de Lord
Neverember, le seigneur démasqué d'Eauprofonde. Jouissant d'une grande
popularité, extrêmement riche, Dagult Neverember est sûrement l'homme le plus
puissant de la Côte des épées. Sa fortune et son influence sont si colossales
qu'il a pu se lancer quasiment seul dans le pharaonique projet de
reconstruction de Neverwinter, le bijou du Nord que l'éruption du mont Hotenow
avait quasiment rasé pendant la magepeste. Malgré cette image publique
flatteuse, il est avant tout un grand seigneur extrêmement ambitieux et les
railleries de Lady Haventree sur ses rêves de grandeur ne diminuent pas le fait
qu'il serait très dangereux de s'attirer ses mauvaises grâces en prenant à
parti directement l'un de ses plus précieux partenaires. C'est donc Lord
Ulbrinter qui se chargera pour l'instant de poursuivre le marchand à travers
les méandres des intrigues de cour derrière lesquelles il s'abrite. Leosin
quant à lui se rendra en Elturgard auprès de son vieil ami Onthar Frume, car si
les serviteurs de Tiamat sont aussi impliqués, alors il ne sera pas superflu de
s'assurer du concours des dragonborns de l'ordre des paladins de Bahamut qui y
résident.
Laeral demande enfin
aux héros de bien vouloir accepter d'enquêter sur la piste de Skyreach Castle
qui semble être la menace la plus immédiate qui pèse sur la Côte des épées. Il
s'agit sûrement de la mission la plus périlleuse du lot et les aventuriers sont
les seuls à avoir démontré les capacités nécessaires pour la mener à bien. Leur
première destination sera donc le marais des morts au cœur duquel est caché le
repaire de Rezmir, Château Naerytar.
Il leur faut quelques
jours pour préparer leur expédition, le temps que le Crinti leur fournisse tout
le matériel dont ils ont besoin. Finnlay ne cache pas son soulagement de
quitter la ville dont la foule l'oppresse pour retrouver des espaces plus
naturels. Leur première étape se trouve à un peu moins d'une semaine au nord
d'Eauprofonde, dans les contreforts des montagnes de l'épée qui bordent la zone
marécageuse dans laquelle ils doivent s'enfoncer. Ils suivent la nouvelle Grand
Route dont Lord Neverember a entrepris la reconstruction bien à l'est de son
tracé original qui a été peu à peu avalé par le marais depuis que la ruine de
Neverwinter a mis un terme soudain à l'usage de cette voie commerciale autrefois
prospère. Le chantier avance lentement en raison de sa complexité, la chaussée
devant être surélevée et renforcée de bois goudronné pour permettre aux
chariots d'y circuler sans risque de s'embourber.
Carnath House |
Les centaines d'ouvriers qui
s'épuisent à cette tâche harassante sont désormais installé dans un camp de
baraques temporaires montées sur pilotis qui s'étend de manière anarchique en
un réseau tentaculaire de passerelles branlantes autour de la halle qui sert de
taverne au lieu connue sous le nom de Carnath House. Dans l'ambiance
surchauffée de leur cantine, les ouvriers se mêlent aux mercenaires qui sont
censés les protéger des dangers susceptibles de surgir des marécages mais qui
les regardent plutôt avec des airs de garde chiourme. Toute une galerie de soi-disant
experts de la survie dans les marais et autres éclaireurs improvisés y traine
également en attendant que les contremaitres les assignent aux équipes qui ont
le malheur d'être choisies pour ouvrir les nouvelles sections de la route.
Ildur est consterné par l'incompétence évidente des premiers hommes qu'il
aborde et c'est donc le Crinti qui se charge de dénicher la perle rare qui
pourra les mener à Château Naerytar. Au lieu de s'adresser directement aux
bonimenteurs qui s'agglutinent autour d'eux dans l'espoir de profiter de
l'aubaine que la bourse bien pleine des étrangers égarés dont ils ont l'air
représente, le demi-drow s'en remet plutôt à l'avis d'un de ses
coreligionnaires. En effet, un petit groupe de prêtres de Waukeen s'est mis en
devoir de parrainer l'entreprise de renouveau du commerce que représente la
reconstruction de la route. Si la bénédiction de la déesse sert avant tout à
éloigner les insectes qui infestent l'atmosphère moite du chantier, il arrive
régulièrement qu'on sollicite leur secours pour soigner les blessures que le
pénible labeur des ouvriers ne manque pas de provoquer. Quand ils doivent ainsi
s'aventurer loin dans le marais, ils ne font confiance qu'à un seul homme, un
demi-orc à la mine patibulaire du nom de Bog Luck qui semble être le seul à
vraiment connaître son affaire.
Bog Luck |
Le nom de Château Naerytar ne lui est de plus
pas totalement inconnu et il assure aux aventuriers qu'il peut les y mener en
quelques jours.
Sa paye est à la hauteur de sa réputation mais après avoir écouté son
opinion sur le matériel qui leur manque pour s'aventurer dans les marais, Ildur
est convaincu qu'elle ne sera pas usurpée et qu'il apprendra peut-être même une
chose où deux au contact du demi-orc.
Le lendemain, leurs affaires chargées sur de petites pirogues de roseau
tressé , les héros quittent le chantier et s'enfonce à la suite de Bog Luck dans
la brume qui couvre toute la région.
Rapidement le bruit des outils et le brouhaha des ouvriers s'estompe et le
silence cotonneux qui les entoure n'est plus brisé que par le clapotis de leurs
pas dans l'eau et le craquement des oignons crus que croque machinalement leur
guide. Leur progression est lente et fatigante sur les sinueux chemins pleins
de vase que leur fait emprunter le demi-orc. Pour autant ces détours n'ont rien
de gratuit car Ildur finit par comprendre les signes qui annoncent les sables
mouvants et autres tourbières mortelles.
A la halte du soir Bog
Luck parvient à leur dénicher une petite langue de terre surélevée qui semble
miraculeusement protégée de l'humidité ambiante. Il y allume un feu sans flamme
à partir de grosses galettes de mousse séchée qu'il tient à l'abri dans des
linges graissés. La fumée âcre qu'elles dégage est certes nauséabonde mais elle
a au moins le mérite de chasser les insectes qui n'ont cessé de harceler les
aventuriers tout au long de la journée. Ils profitent aussi de la chaleur des
braises pour délasser leurs pieds fripés par leur longue marche dans l'eau du
marécage. En retirant leurs bottes Finnlay et le Crinti ont la désagréable
surprise de découvrir que leurs jambes sont constellées de sangsues gorgées de
sang, ce qui arrache un ricanement amusé à Bog Luck. Sans prendre note de la
réaction ombrageuse des aventuriers à son hilarité, il leur montre comment se
débarrasser des parasites en y appliquant une lame chauffée dans les braises
avant de se coucher avec un dernier rire moqueur.
La nuit du marais est
étonnamment bruyante, la faune indiscernable dans le brouillard ne semblant pas
connaître le sommeil. Ce tintamarre nocturne ne pèse cependant pas bien lourd
face à la lassitude des héros qui s'endorment rapidement.
Finnlay reste seul à
veiller, savourant ce moment enfin loin de toute civilisation. Il s'habitue peu
à peu à l'obscurité blanchâtre dont la brume l'enveloppe et sa vue perçante lui
permet d'apercevoir les lueurs d'une lanterne qui passe dans le lointain. Il
tente de réveiller Ildur pour lui faire part de sa découverte mais le temps
qu'il se relève la nuit est redevenue immobile. Le ranger se recouche en
grommelant mais la curiosité de Finnlay doit maintenant être assouvie et il
convoque une nuée de chauve-souris à qui il ordonne d'aller explorer les
alentours. Au bout de quelques minutes un des zélés chiroptères vient lui faire
son rapport en lui communiquant fièrement qu'il a vu des gens qui marchent.
Frustré par l'incapacité de l'animal à lui en dire plus, le druide décide
d'aller enquêter par lui-même. Il se glisse donc dans la forme d'un serpent
d'eau et file entre les roseaux dans la direction prise par les lumières. Il ne
tarde pas à retrouver la lueur qu'il avait repérée accompagnée cette fois des
voix sifflantes d'une étrange bande d'hommes lézards aux écailles grisâtres qui
tiennent un conciliabule accroupis entre les joncs. Derrière eux, une imposante
bête de somme couverte de poils roux filasses fouille la vase de son long cou
en poussant des beuglements batraciformes. Finnlay s'approche encore de
quelques ondulations de sa forme ophidienne pour essayer de mieux entendre les
conspirations des hommes -lézards. Soudain l'un des globes luminescents pendus
au bâton de celui qui semble être le chef de la bande s'anime et vient flotter au-dessus
de Finnlay. Les hommes-lézards se taisent aussitôt et tournent leurs regards
dans sa direction. Finnlay ressent alors
une atroce sensation de brûlure alors que la boule de lumière plonge sur lui
avec un sifflement suraigu et le traverse de part en part. La surprise le
contraint à reprendre forme humaine et les deux autres feux follets quittent le
perchoir du bâton de leur maître pour se précipiter sur lui tels un essaim de
guêpes furieuses. Pris de panique le druide s'apprête à fuir quand il voit la
bête rousse lever son museau de la fange pour tourner son regard bovin injecté
de sang vers lui. Une insoutenable odeur de charogne le prend alors à la gorge,
il sent son estomac se retourner alors qu'il s'écroule dans la boue et emporte
une dernière image des hommes-lézards qui le fixent en silence avant de sombrer
dans l'inconscience.
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