mardi 15 février 2022

Le Roi de la Forêt des Brumes

 



Une aventure de Donjons & Dragons de niveau 12

 

Avec

 

 

 

Arias Letho Mortegueule, Le chasseur de mage qui sert une diatribe au vitriol

 

Kri Shanu, Le moine qui tente une approche plus diplomatique

 

Thormund Sombracier, Le barbare qui s’étonne de la prudence de ses compagnons

 

Faerdhallarlasar "Rka" Muulkennirrhialiandeth, le drakéide qui rappelle qu’on ne tue pas ses prisonniers

 

 

 

Les brumes s’écartent sur le passage du prince Alagarthas et de sa suite. Les arbres frissonnent et les oiseaux pépient pour lui souhaiter la bienvenue mais leurs murmures pointent un doigt réprobateur vers les intrus que son escorte entoure. Bientôt les troncs s’élancent si haut que leur frondaison remplace le ciel. Dans la pénombre les étoiles s’animent et volettent entre les branches, papillons luminescents dont le ballet allume de douces lumières dans les demeures accrochées entre les arbres. Des visages curieux apparaissent aux balcons, les sourires et les saluts accueillent le fils du roi et ses compagnons. Pas après pas, la suite princière abandonne ses atours guerriers et se mue en une joyeuse réunion où nul ne saurait dire qui est le servant et qui est le noble, chacun apportant les coupes d’eau fraîche et les biscuits parfumés avec la même simplicité et le même entrain. Soudain les rires s’arrêtent, tous les visages se tournent vers le haut de l’escalier qui descend le long du plus large des troncs des alentours. Peren, le capitaine de la garde royale, se dresse sévère en haut des marches, fusillant les héros du regard. Les elfes qui les entourent s’inclinent tous en une respectueuse révérence alors que Peren s’écarte pour laisser le passage à leur seigneur, le roi Melandrach en personne. 

Le Roi Melandrach


Le souverain a la mâchoire serrée et les sourcils froncés par la contrariété. Ses sujets encore si enjoués un instant plus tôt s’éclipsent en silence les uns après les autres, laissant le prince et les aventuriers seuls face au courroux royal. Mais les reproches de Melandrach ne viennent frapper que son fils indiscipliné, les héros ne semblent pas exister à ses yeux tant il les ignore. Face aux remontrances de son père, Alagarthas perd ses moyens et s’éloigne à son tour la tête basse tel un petit enfant qui vient de se faire gronder. Melandrach tourne le dos à son tour et s’apprête à partir sans avoir adressé le moindre signe aux humains que son fils a cru bon de lui ramener.

Piqué au vif par tant de mépris, Arias fait tonner une voix accusatrice contre le Roi :

« Roi Melandrach tourne-regard ou devrais-je dire Roi Melandrach tourne-casaque nous y voilà.

Mais quoi de moins surprenant de la part d’un seigneur qui se complaît dans un site hanté par la magie, corrompu par l’art de Mystra. Quoi de moins surprenant de la part d’un peuple entier qui refuse d’affronter le monde tel qu’il est.

Heureusement le défrichement de mes semblables a tenu votre corruption hors des royaumes civilisés.

Estimez-vous heureux que le Baron Thuragar n’ait pas encore porté son regard sur votre bosquet scintillant.

Et donc vous vous sentez à l’abri dans cette nature contrefaite, hors du monde, … j’avoue être heureux de savoir d’avance que le Culte va vous ramener aux vraies valeurs de notre réalité.

Sortez de votre futile chrysalide magique et osez mener le vrai combat que tout seigneur digne de ce nom se doit de mener.

Mener vos hommes à l’unisson des poings enflammés ou même seul, mais la guerre résonne et vous ne pouvez ignorer son appel.

Soyez le prédateur si vous en avez le courage, mais ne vous y trompez pas vous vivrez la curée d’une façon ou d’une autre.

Roi Melandrach, écoutez votre fils. »


Le souverain tourne à peine la tête vers Arias et d’une voix d’un calme glaçant, il balaie ses accusations en réaffirmant que sa maison est en ordre et que ce n’est pas aux elfes de régler les problèmes des humains. Kri tente une approche plus diplomatique en tempérant les propos d’Arias. Ils sont venus proposer leur aide et espèrent en recevoir en retour. Mais le roi refuse cette main tendue, quoiqu’il concède que les siens répondront à l’appel si la guerre se déclare réellement comme ils l’ont fait jadis pour chasser les démons de Dragonspear aux côtés de l’armée d’Eauprofonde. Kri insiste et demande à en savoir plus sur Neronvain, le wyrmspeaker vert qui a établi son repaire dans la Grande Forêt. En entendant cela, Melandrach cède à la colère. Il leur répète qu’il a fait ce qu’il devait faire pour faire cesser les troubles dans son royaume et le culte a été chassé de son domaine. Il n’a de leçons à recevoir de personne, il ne veut pas de leur aide et n’a plus rien à leur dire.

 

Plus tard ce soir-là, Alagarthas se glisse discrètement jusqu’à la douillette cabane mise à disposition des aventuriers. Il leur présente des excuses pour la façon dont le roi les a traités, mais il leur explique que son père est surtout furieux qu’Alagarthas se soit mis en danger inutilement à cause d’eux dans l’affrontement de la veille. La perspective de perdre un nouvel héritier après avoir déjà enduré la mort de son aîné, Belgardas le terrifie mais son orgueil l’empêche de l’admettre. Sa colère n’est en fait rien d’autre que l’angoisse d’un père éploré et Alagarthas implore les héros de ne pas lui en tenir rigueur. Le prince n’a plus l’autorisation de sortir de la Forêt des Brumes, mais il leur donne le nom d’un de ses amis de confiance qui pourra les guider dans la Grande Forêt, un certain Margwais qui est le gardien du village elfe de Nordhaeril. Les forestiers qui commercent à Secomber pourront les mener jusque-là en quelques jours.

Les héros quittent la cour de Melandrach le matin suivant. Un des guerriers qui les avait escortés la veille leur sert à nouveau de guide à travers les brumes, mais à l’instar de son souverain, il fait tout pour les ignorer malgré l’insistance de Rka pour lui faire comprendre la gravité de la situation qui les a poussés à défier les consignes du roi.



Leur arrivée à Secomber deux jours plus tard ne passe pas inaperçue. La réputation des héros du Nord est déjà parvenue dans le bourg. On les amène donc au bourgmestre, Traskar Selorn, qui espère qu’ils sont venus apporter la réponse de Lord Neverember à la demande de renforts qu’il lui a adressée. Uluvin et plusieurs autres villages en lisière de la forêt ont été mis à sac ces dernières semaines et leurs habitants ont tous disparu sans laisser de traces. Les bucherons n’osent plus s’approcher et les rives de la Delimbyir où s’entassent habituellement les troncs débités en amont sont désespérément vides. Plus inquiétant encore, un émissaire de Loudwater est arrivé il y a quelques jours pour savoir si Secomber pourrait accueillir une partie de la population de la communauté en cas d’urgence. Le sorcier au masque de fer leur a effectivement lancé un ultimatum ; seuls les elfes sont autorisés à rester dans les vestiges du royaume d’Eaerlann, les humains avec qui ils cohabitent doivent partir, en revanche tous les demi-elfes issus de leurs unions depuis des décennies doivent être livrés sans condition au culte. Si ces demandes ne sont pas satisfaites, alors l’ancien domaine elfique sera purgé par la force et tous connaitront le même sort funeste que les sang-mêlés qu’ils protègent. Pour l’instant, personne ne veut céder à cet odieux chantage mais s’il faut se battre, les gens de Loudwater veulent savoir où pourront se réfugier ceux qui ne peuvent prendre les armes.

Les héros partent sans attendre au secours de Loudwater. Ils font apparaître leur gigantesque roc pour y aller encore plus vite par la voie des airs et c’est sous les acclamations réjouies d’une foule de curieux attirés par l’oiseau multicolore géant qu’ils décollent.

Malgré l’altitude vertigineuse à laquelle ils se déplacent, l’œil d’aigle de Thormund repère un étrange campement dissimulé près de la route. Un détachement de hobgobelins y retient prisonniers plusieurs familles de demi-elfes qui ont été interceptées en tentant de prendre la fuite avant que l’ultimatum n’expire. Les héros se posent hors de vue et progressent discrètement entre les arbres pour encercler le camp. Rka lance les hostilités en dévastant le gros des troupes adverses par une boule de feu avant de venir assommer le dragonwing à la tête des hommes du culte qui s’étaient joint aux gobelinoides. Arias égorge le capitaine des hobgobelins avant qu’il puisse rassembler ses troupes, tandis que Thormund fond sur les deux ogres qui se chamaillaient en bordure de la clairière. Da lame ensorcelée éventre le premier tandis que le deuxième est terrassé par le froid mortel de l’armure d’Agathys qui se propage jusqu’à son cœur lorsqu’il tente de saisir le barbare entre ses mains difformes. Arias abat les fuyards gobelins en les poursuivant de ses implacables projectiles magiques et Kri se charge de rattraper le drake gardien, dernier témoin de l’affaire, dont il fracasse le crâne en le projetant contre un tronc. L’ultime survivant du carnage éclair est un malheureux soldat hobgobelin qui préfère se rendre plutôt que de suivre ses camarades dans la mort.