mercredi 23 janvier 2019

Le Pacte de la Main d'Argent



Une aventure de Donjons & Dragons de niveau 8

Avec


Balak Charon Taâl dit le Crinti, le demi-drow à l’entregent étonnant

Ildur Main d’Airain, Le ranger qui a encore quelques astuces à apprendre

Finnlay Galindan, Le druide qui tombe dans un traquenard
Tengrim Copperplate, Le nain qui se souvient des alliances oubliées




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Les dernières semaines de l'hiver ont passé comme un charme et l'heure de quitter le Valbise est venue pour les héros qui l'ont arraché aux griffes du mal. La principale inquiétude de Duvessa Shane et de ses conseillers du Zhentarim est maintenant la présence de Talis dans leurs geôles qui peut à tout moment attirer le courroux d'Arautathor. Les héros sont donc chargés d'escorter la wyrmspeaker en toute discrétion vers Eauprofonde dont les antiques protections magiques barrent l'accès à la cité à tous les dragons. Chaldos Vedriga arrange leur passage de Fireshear vers Luskan à bord d'un des drakkars ruathens qui avait convoyé ses troupes quelques semaines auparavant. C'est ensuite Enwyn Dawe qui se charge de leur trouver une place sur l'un de ses navires à destination d'Eauprofonde où l'un des associés d'Icham les attendra pour les guider à travers les méandres de la métropole. En effet, contre toute attente, le barde a choisi de ne pas accompagner ses compagnons vers le sud, certaines de ses affaires de la plus haute importance nécessitant encore sa présence dans le nord. Il confie donc la charge de poursuivre sa tâche à un homme de confiance, le fameux Balak Charon Taâl dit le Crinti, changeur de monnaie de Waukeen dont la réputation n'est plus à faire le long de la route du commerce. 


Lorsqu'ils entrent dans la large baie qui abrite le port d'Eauprofonde les héros sont saisis par l'immensité de la ville qui se déploie devant eux. Derrière les centaines de mâts qui se balancent au-dessus des quais un interminable dédale de rues pavées grouillant d'une foule bigarrée s'étend à perte de vue. Une armada de calèches de toutes tailles sillonne les boulevards, descendant des palais extravagants de la noblesse du district nord vers la cohue cosmopolite du district des marchands en passant par les imposantes flèches des temples du district du château. La forteresse elle-même se dresse au sommet de la falaise qui protège la rade des tempêtes hivernales et dans le ciel au-dessus des étendards multicolores qui flottent sur ses tours les griffons de la célèbre cavalerie aérienne d'Eauprofonde effectue une large boucle avant de plonger vers le lointain en effleurant le heaume de l'Honorable Chevalier, l'une des colossales statues animées qui avaient ravagé la ville pendant la magepeste. 

Les aventuriers sont accueillis dès leur descente du navire par le Crinti qui a déjà réglé toutes les formalités d'entrée dans la ville avec le magistrat du jour. La patrouille de miliciens qui l'accompagne les laissent ainsi passer avec leur sinistre prisonnière sans poser de question. 
Le Crinti semble fort bien renseigné sur leur compte et s'avère un homme affable malgré son inquiétante ascendance. Sa peau grisée et ses cheveux d'un blanc de neige lui donnent en effet tous les airs d'un demi-drow, ce qui ne manque pas de troubler Tengrim dont les souvenirs des elfes noirs restent traumatisants. 

Une calèche privée les attend à la sortie du port pour les emmener vers le district nord où résident les amis d'Enwyn Dawe. Ils traversent la ville à vive allure au milieu d’une foule innombrable qui vaque à ses occupations, indifférente au ballet des attelages qui vont et viennent sur les pavés. L'opulence de la cité est d'autant plus frappante que ses rues sont d'une propreté exemplaire, ce qui tient de l'exploit au regard de la population qui s'y presse chaque jour. 
La calèche bifurque enfin vers les rues plus paisibles du luxueux district nord et s'engouffre dans la cour intérieure d'un somptueux hôtel particulier. Avec un hochement de tête entendu, le Crinti confie Talis à trois spadassins aux airs d'aventuriers avant de faire signe à ses compagnons de le suivre à l'intérieur du manoir.  Ils traversent un dédale de couloirs de services qui les mène à une antichambre richement meublée où ils ont la surprise de retrouver un visage connu. Leosin Erlanthar, l'érudit d'Oghma qu'ils ont libéré des griffes du culte du dragon, se lève en souriant à leur entrée et vient leur donner une chaleureuse accolade.
Lord Ulbrinter
Il leur présente également leurs hôtes, Lord Arthagast Ulbrinter et sa femme, Lady Remalia Haventree.
Dans la force de l'âge, Lord Ulbrinter s'éclipse avec une bienveillante modestie devant la beauté rayonnante de son épouse qui sait vite faire oublier sa qualité de haute dame du royaume elfique d'Everaska par l'amicale franchise avec laquelle elle s'adresse à ses invités.
Remi Haventree
Leosin prend quelques instants pour s'enquérir des nouvelles du Valbise, et calme les inquiétudes des héros quant à la fiabilité des hommes qui ont récupéré Talis en leur révélant que tout comme lui ceux-ci sont membres d'une bien ancienne confrérie qu'ils s'appliquent à sauver de l'oubli et dont il porte le symbole au creux de sa veste, une harpe d'argent dans un croissant de lune. Tengrim reconnait le vieux symbole des ménestrels, une société secrète qu'il pensait disparue depuis bien longtemps mais dont les membres étaient connus pour toujours défendre la cause des innocents. Le nain a tout juste le temps d'expliquer cela à ses amis que la porte de l'étude s'ouvre à nouveau pour laisser entrer celle qui les a fait venir jusqu'à Eauprofonde, la légendaire Lady Laeral Silverhand, l'immortelle élue de Mystra et veuve du non moins célèbre archimage d'Eauprofonde, Khelben "Bâton noir" Arunsun. 

 
Laeral Silverhand
Tout le monde se lève pour saluer d'une révérence la nouvelle venue mais celle-ci leur demande d'oublier les formalités car c'est en tant qu'amis qu'elle les a ainsi rassemblés. Il faut pourtant quelques minutes aux héros pour réussir à passer outre l'aura de puissance qui crépite dans la voix de Laeral, mais son sourire franc et l'amicale complicité qu'elle affiche avec Lady Haventree et son époux finissent par détendre suffisamment l'atmosphère pour que chacun participe sans frein à la conversation. Les exploits des aventuriers sont arrivés aux oreilles de Laeral qui les en félicitent sincèrement. Elle espère qu'ils accepteront de les aider à démêler les fils du complot du culte du dragon qu'ils ont mis au jour, car contrairement à ce qu'ils peuvent croire les ménestrels ont peu de ressources et encore moins d'agents fiables qui ont les capacités nécessaires pour affronter les forces du culte. Leurs accusations contre Vaelish Gant ont bien été entendues, mais il est difficile de s'en prendre à lui directement car son père, le vieil Albrecht Gant, est un des plus proches amis de Lord Neverember, le seigneur démasqué d'Eauprofonde. Jouissant d'une grande popularité, extrêmement riche, Dagult Neverember est sûrement l'homme le plus puissant de la Côte des épées. Sa fortune et son influence sont si colossales qu'il a pu se lancer quasiment seul dans le pharaonique projet de reconstruction de Neverwinter, le bijou du Nord que l'éruption du mont Hotenow avait quasiment rasé pendant la magepeste. Malgré cette image publique flatteuse, il est avant tout un grand seigneur extrêmement ambitieux et les railleries de Lady Haventree sur ses rêves de grandeur ne diminuent pas le fait qu'il serait très dangereux de s'attirer ses mauvaises grâces en prenant à parti directement l'un de ses plus précieux partenaires. C'est donc Lord Ulbrinter qui se chargera pour l'instant de poursuivre le marchand à travers les méandres des intrigues de cour derrière lesquelles il s'abrite. Leosin quant à lui se rendra en Elturgard auprès de son vieil ami Onthar Frume, car si les serviteurs de Tiamat sont aussi impliqués, alors il ne sera pas superflu de s'assurer du concours des dragonborns de l'ordre des paladins de Bahamut qui y résident. 
Laeral demande enfin aux héros de bien vouloir accepter d'enquêter sur la piste de Skyreach Castle qui semble être la menace la plus immédiate qui pèse sur la Côte des épées. Il s'agit sûrement de la mission la plus périlleuse du lot et les aventuriers sont les seuls à avoir démontré les capacités nécessaires pour la mener à bien. Leur première destination sera donc le marais des morts au cœur duquel est caché le repaire de Rezmir, Château Naerytar.  

Il leur faut quelques jours pour préparer leur expédition, le temps que le Crinti leur fournisse tout le matériel dont ils ont besoin. Finnlay ne cache pas son soulagement de quitter la ville dont la foule l'oppresse pour retrouver des espaces plus naturels. Leur première étape se trouve à un peu moins d'une semaine au nord d'Eauprofonde, dans les contreforts des montagnes de l'épée qui bordent la zone marécageuse dans laquelle ils doivent s'enfoncer. Ils suivent la nouvelle Grand Route dont Lord Neverember a entrepris la reconstruction bien à l'est de son tracé original qui a été peu à peu avalé par le marais depuis que la ruine de Neverwinter a mis un terme soudain à l'usage de cette voie commerciale autrefois prospère. Le chantier avance lentement en raison de sa complexité, la chaussée devant être surélevée et renforcée de bois goudronné pour permettre aux chariots d'y circuler sans risque de s'embourber. 

Carnath House

Les centaines d'ouvriers qui s'épuisent à cette tâche harassante sont désormais installé dans un camp de baraques temporaires montées sur pilotis qui s'étend de manière anarchique en un réseau tentaculaire de passerelles branlantes autour de la halle qui sert de taverne au lieu connue sous le nom de Carnath House. Dans l'ambiance surchauffée de leur cantine, les ouvriers se mêlent aux mercenaires qui sont censés les protéger des dangers susceptibles de surgir des marécages mais qui les regardent plutôt avec des airs de garde chiourme. Toute une galerie de soi-disant experts de la survie dans les marais et autres éclaireurs improvisés y traine également en attendant que les contremaitres les assignent aux équipes qui ont le malheur d'être choisies pour ouvrir les nouvelles sections de la route. Ildur est consterné par l'incompétence évidente des premiers hommes qu'il aborde et c'est donc le Crinti qui se charge de dénicher la perle rare qui pourra les mener à Château Naerytar. Au lieu de s'adresser directement aux bonimenteurs qui s'agglutinent autour d'eux dans l'espoir de profiter de l'aubaine que la bourse bien pleine des étrangers égarés dont ils ont l'air représente, le demi-drow s'en remet plutôt à l'avis d'un de ses coreligionnaires. En effet, un petit groupe de prêtres de Waukeen s'est mis en devoir de parrainer l'entreprise de renouveau du commerce que représente la reconstruction de la route. Si la bénédiction de la déesse sert avant tout à éloigner les insectes qui infestent l'atmosphère moite du chantier, il arrive régulièrement qu'on sollicite leur secours pour soigner les blessures que le pénible labeur des ouvriers ne manque pas de provoquer. Quand ils doivent ainsi s'aventurer loin dans le marais, ils ne font confiance qu'à un seul homme, un demi-orc à la mine patibulaire du nom de Bog Luck qui semble être le seul à vraiment connaître son affaire. 

Bog Luck

Le nom de Château Naerytar ne lui est de plus pas totalement inconnu et il assure aux aventuriers qu'il peut les y mener en quelques jours. 
Sa paye est à la hauteur de sa réputation mais après avoir écouté son opinion sur le matériel qui leur manque pour s'aventurer dans les marais, Ildur est convaincu qu'elle ne sera pas usurpée et qu'il apprendra peut-être même une chose où deux  au contact du demi-orc.  
Le lendemain, leurs affaires chargées sur de petites pirogues de roseau tressé , les héros quittent le chantier et s'enfonce à la suite de Bog Luck dans la brume qui couvre toute la région.  
Rapidement le bruit des outils et le brouhaha des ouvriers s'estompe et le silence cotonneux qui les entoure n'est plus brisé que par le clapotis de leurs pas dans l'eau et le craquement des oignons crus que croque machinalement leur guide. Leur progression est lente et fatigante sur les sinueux chemins pleins de vase que leur fait emprunter le demi-orc. Pour autant ces détours n'ont rien de gratuit car Ildur finit par comprendre les signes qui annoncent les sables mouvants et autres tourbières mortelles.  
A la halte du soir Bog Luck parvient à leur dénicher une petite langue de terre surélevée qui semble miraculeusement protégée de l'humidité ambiante. Il y allume un feu sans flamme à partir de grosses galettes de mousse séchée qu'il tient à l'abri dans des linges graissés. La fumée âcre qu'elles dégage est certes nauséabonde mais elle a au moins le mérite de chasser les insectes qui n'ont cessé de harceler les aventuriers tout au long de la journée. Ils profitent aussi de la chaleur des braises pour délasser leurs pieds fripés par leur longue marche dans l'eau du marécage. En retirant leurs bottes Finnlay et le Crinti ont la désagréable surprise de découvrir que leurs jambes sont constellées de sangsues gorgées de sang, ce qui arrache un ricanement amusé à Bog Luck. Sans prendre note de la réaction ombrageuse des aventuriers à son hilarité, il leur montre comment se débarrasser des parasites en y appliquant une lame chauffée dans les braises avant de se coucher avec un dernier rire moqueur. 
La nuit du marais est étonnamment bruyante, la faune indiscernable dans le brouillard ne semblant pas connaître le sommeil. Ce tintamarre nocturne ne pèse cependant pas bien lourd face à la lassitude des héros qui s'endorment rapidement. 

Des lumières dans la nuit

Finnlay reste seul à veiller, savourant ce moment enfin loin de toute civilisation. Il s'habitue peu à peu à l'obscurité blanchâtre dont la brume l'enveloppe et sa vue perçante lui permet d'apercevoir les lueurs d'une lanterne qui passe dans le lointain. Il tente de réveiller Ildur pour lui faire part de sa découverte mais le temps qu'il se relève la nuit est redevenue immobile. Le ranger se recouche en grommelant mais la curiosité de Finnlay doit maintenant être assouvie et il convoque une nuée de chauve-souris à qui il ordonne d'aller explorer les alentours. Au bout de quelques minutes un des zélés chiroptères vient lui faire son rapport en lui communiquant fièrement qu'il a vu des gens qui marchent. Frustré par l'incapacité de l'animal à lui en dire plus, le druide décide d'aller enquêter par lui-même. Il se glisse donc dans la forme d'un serpent d'eau et file entre les roseaux dans la direction prise par les lumières. Il ne tarde pas à retrouver la lueur qu'il avait repérée accompagnée cette fois des voix sifflantes d'une étrange bande d'hommes lézards aux écailles grisâtres qui tiennent un conciliabule accroupis entre les joncs. Derrière eux, une imposante bête de somme couverte de poils roux filasses fouille la vase de son long cou en poussant des beuglements batraciformes. Finnlay s'approche encore de quelques ondulations de sa forme ophidienne pour essayer de mieux entendre les conspirations des hommes -lézards. Soudain l'un des globes luminescents pendus au bâton de celui qui semble être le chef de la bande s'anime et vient flotter au-dessus de Finnlay. Les hommes-lézards se taisent aussitôt et tournent leurs regards dans sa direction. Finnlay ressent alors une atroce sensation de brûlure alors que la boule de lumière plonge sur lui avec un sifflement suraigu et le traverse de part en part. La surprise le contraint à reprendre forme humaine et les deux autres feux follets quittent le perchoir du bâton de leur maître pour se précipiter sur lui tels un essaim de guêpes furieuses. Pris de panique le druide s'apprête à fuir quand il voit la bête rousse lever son museau de la fange pour tourner son regard bovin injecté de sang vers lui. Une insoutenable odeur de charogne le prend alors à la gorge, il sent son estomac se retourner alors qu'il s'écroule dans la boue et emporte une dernière image des hommes-lézards qui le fixent en silence avant de sombrer dans l'inconscience. 


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