mercredi 24 juillet 2019

A la poursuite de Skyreach Castle



Une aventure de Donjons & Dragons de niveau 9

Avec


Tengrim Copperplate, Le nain tueur de géants 

Finnlay Galindan, Le druide aux mille questions 

Ildur Main d’Airain, Le ranger dresseur de wyvernes 




Le lourd battement des ailes de cuir des wyvernes emporte les héros par-dessus les sommets des Pics Gris. Leurs montures sont loin d'être des plus commodes et malgré les efforts d'Ildur pour les amadouer, ils redoutent chaque matin au moment de sauter en selle que leurs aiguillons empoisonnés ne les embrochent. Après deux jours de vol plein Est, une étrange formation nuageuse apparaît à l'horizon. Noires comme à l'imminence d'une tempête, les nuées roulent les unes sur les autres comme poussées des quatre points cardinaux par des vents contradictoires. A l'approche du curieux phénomène, les wyvernes s'agitent, leurs cris stridents semblant répondre à de lointains appels inaudibles pour l'oreille humaine. Les montagnes font peu à peu place à un désert de rocailles couturé de ravins où plus rien ne pousse depuis la chute de l'empire du Netheril. De l'abri de la crevasse où ils se sont posé les aventuriers inquiets scrutent le ciel à la recherche de la forteresse qui s'y cache. Aucun mouvement ne trahit sa présence. Ce n'est qu'à la nuit tombée qu'ils discernent enfin un signe qu'ils ont suivi la bonne piste. Deux silhouettes ailées de taille humaine se découpent dans le rideau de rayons de lune qui tombent à la frontière des nuages. Sans hésiter elles s'y engouffrent et y disparaissent, puis tout reste immobile jusqu'au matin. Dans la pale lueur de l'aube, les obscurs cumulus s'écartent, repoussés par la lente descente d'un rocher colossal suspendu par magie dans les airs. 


Ses flancs sont constellés de cavernes reliées par un maillage de passerelles et d'escaliers accrochés sur le vide. A son sommet les parois de granit noir se muent en murailles vertigineuses renforcées de tours de guet aux proportions gargantuesques. Les pointes acérées de grandes balistes dépassent entre leurs créneaux et même la stature des sentinelles qui arpentent le chemin de ronde semble démesurée. L'impossible vaisseau de pierre s'arrête à quelques mètres du sol et son flanc s'ouvre pour dérouler une longue passerelle de marbre sur laquelle s'engage une sinistre délégation. A sa tête les héros reconnaissent l'aspect immanquable de Rezmir, flanquée de deux étranges formes un peu bossues couvertes de la tête aux pieds de grandes capes grises. Derrière eux une vingtaine de kobolds brandissant l'étendard de la quintuple griffe tirent un chariot soigneusement bâché sous supervision de quelques dragonclaws. L'escorte de la wyrmspeaker est enfin complétée par quatre monstrueux demi-dragons dont les écailles d'obsidienne se confondent avec les lourdes armures noires qui les recouvrent. Les aventuriers hésitent un instant à les suivre mais ils estiment finalement que leurs chances de sortir vainqueur d'une embuscade contre cette troupe sont trop minces pour tenter leur chance. Ils laissent donc Rezmir s'éloigner suffisamment pour qu'elle ne puisse pas les surprendre au sortir de leur cachette, puis ils remontent en selle pour pousser leurs wyvernes vers les nuages dans lesquels Skyreach Castle s'est à nouveau enfoncé. Préférant éviter la large passerelle qui semble dédiée à accueillir les montures volantes, ils choisissent plutôt de se glisser dans l'une des larges cavernes qui s'ouvrent sur la face inférieure de la forteresse. Les wyvernes rechignent cependant à pénétrer plus loin dans les entrailles du rocher et à peine ont-ils mis pied à terre qu’elles repartent avec enthousiasme vers les écuries qui les attendent au niveau supérieur. Les boyaux dans lesquels s'enfoncent désormais les héros sont plongés dans une profonde obscurité. Tengrim est certain que le dédale est d'origine naturelle et qu'il était déjà présent avant que le roc ne soit arraché à la terre par une magie extrêmement puissante. Ces réflexions sont soudainement interrompues par un cri déchirant dont l'écho se répercute à travers les galeries qui les entourent. Presque humain le hurlement fait naître un sentiment de pitié irrépressible dans le cœur des aventuriers. En remontant vers la source de ces gémissements de douleur, ils croisent des signes de plus en plus nets que les grottes qui parsèment les sous-sols ne sont pas toutes abandonnées. Ce sont d'abord des glapissements caractéristiques de kobolds qui leur parviennent aux oreilles, puis Tengrim découvrent d'inquiétantes traces de griffes qui ont mordu la pierre des souterrains les plus larges. C'est enfin une odeur volcanique insistante, étrangement mêlée d'un léger parfum de violette, qui assaille leurs narines. Le rugissement pathétique s'élève à nouveau devant eux au moment même où la lumière ardente d'une explosion de flammes illumine le dernier couloir qu'ils empruntent. Avec une extrême prudence, ils approchent pour espionner la voix caverneuse qui ricane des tortures auxquelles elle s'adonne. Dans les reflets rougeoyants de la pierre calcinée, ils découvrent la forme bestiale d'un dragon rouge. 

Glazhael le Rouge

Aussi grand qu'un chariot, ses larges ailes repliées dans le dos et sa longue queue fouettant le sol, il arpente souplement le sol d'une vaste caverne en cherchant quel nouveau tourment infliger à sa victime. Crucifié contre la paroi par de grands pieux métalliques, un petit dragon aux écailles cuivrées lutte au seuil de la conscience pour préserver les dernières forces de son corps brisé. Entre deux questions, Glazhael, le dragon rouge, se régale à imaginer les ravages que lui offrira sa déesse quand les plans du culte auront abouti. Il sent déjà craquer sous ses crocs les os délicats des elfes et les panses rebondies des nains, mais ce qui le réjouit encore plus que tout le reste, c'est la perspective de voir enfin les dragons métalliques vaincus par la rage de Tiamat face à laquelle même le roi de justice et toute son arrogance devront courber l'échine. Felgolos, le jeune dragon de cuivre, soupire devant ces élucubrations car de son point de vue la rage destructrice de la reine du chaos ne fera pas le tri dans ses victimes et le culte sera anéanti comme les autres par la folie de son projet. 
Ses mises en garde sont bien sûr ignorées par Glazhael qui redouble de violence pour lui arracher le secret des coffres d'Elturgard que Felgolos semble bien décidé à emporter dans la tombe. Mais le dragon rouge ne compte pas le laisser s'en tirer aussi facilement et il ordonne à ses lieutenants kobolds de piocher dans son trésor personnel les potions nécessaires à maintenir le dragon de cuivre au seuil de la mort, là où la souffrance est la plus intense et le désespoir le plus noir.  
Comptant sur la cruauté de son tortionnaire pour assurer sa survie encore un moment, les aventuriers renoncent à porter secours au malheureux dragon métallique et continuent leur exploration de la forteresse. Leurs pas les conduisent toujours plus haut, jusqu'à enfin déboucher à l'air libre. La galerie dont ils émergent donne sur la cour intérieure du château gigantesque dont ils ont aperçu les murailles un peu plus tôt. Entièrement taillée dans un marbre blanc façonné par magie, elle n'a de toute évidence pas été conçue à l'échelle humaine. Tout y est beaucoup trop grand, en particulier les fantastiques machines de guerre encore en construction autour desquelles veillent de massifs ogres engoncés dans de somptueuses livrées supplantées de rutilants casques à plumes qui ne font qu'accentuer le grotesque de leur faciès. Au-dessus d'eux s'élève la titanesque tour centrale du château, ses façades marmoréennes percées de vitraux magnifiques où d'héroïques figures couronnées de lauriers d'or étranglent des bêtes serpentines de leurs mains nues. En face d'eux une puissante herse interdit l'accès au grand escalier qui descend vers le niveau inférieur. 


De l'autre côté de la cour, une tour secondaire semble elle aussi habitée car de sa grande fenêtre entrouverte s'échappe un filet de fumée bleuâtre. Quelques mètres plus loin, une vaste serre s'accroche au rempart et une ombre colossale s'y affaire au milieu de la végétation. Le jardin exotique semble malgré tout être le point d'entrée le plus aisé vers l'intérieur du château. Ildur repère avec précision le rythme des rondes ses sentinelles et à son signal lorsqu'il est sûr que les regards ne seront pas tournés vers eux, il s'élance à travers la cour, suivi de ses compagnons couverts par la magie de Finnlay qui a fait dériver un banc de nuages sur le trajet qu'ils empruntent. En passant devant la fenêtre de la tour secondaire, ils aperçoivent l'origine des fumeroles qui s'en dégagent. Deux géants de pierre à la peau grise sont penchés au-dessus d'un chaudron bouillonnant dans lequel ils plongent leurs regards interrogateurs tout en psalmodiant un rituel primitif. Tout absorbés par leur méditation, ils ne remarquent pas les héros qui se faufilent au-dessus d'eux jusqu'à la haute porte de verre qui permet d'entrer dans la serre. Le paysage qu'il découvrent derrière est tout bonnement fantastique. Une collection incroyable d'essences rares s'y épanouit dans une atmosphère tropicale. Des perroquets multicolores de Maztica nichent dans les arbres inconnus de la jungle de Chult à côté desquels pendent les lourdes grappes des étranges fruits de Kara Tur. Les parfums extraordinaires qui envahissent l'air tournent la tête des aventuriers qui se tapissent sous les buissons taillés de la lointaine Durpar qui bordent les allées. Derrière les feuilles rouges qui les cachent, le colossal jardinier est tout à son œuvre, sifflotant joyeusement tout en faisant claquer les lames énormes de son sécateur. Un feulement méfiant se fait soudain entendre au pied de la haie. Une grande panthère de Zakhara aux rayures fauves a senti l'odeur des aventuriers et se tient prête à bondir à quelques pas d'eux. Ses grondements ont attiré l'attention de son maître qui interrompt la taille de ses arbres pour venir la disputer comme on le ferait avec un quelconque matou. Se sachant près d'être découvert, Finnlay préfère se révéler. Face à lui se tient un vieux géant des nuages, sa fine barbe blanche tombant de son visage parcheminé sur le tablier de cuir qu'il a passé sur sa robe d'azur et d'or. 

Zephyros

Le vieillard interloqué n'a pas le temps de se remettre de sa surprise que déjà le druide l'assaille de questions à un rythme effréné qui le décontenance encore plus. Leur hôte ne semblant pas hostile, Ildur et Tengrim s'avancent à leur tour. Le géant profite alors de la diversion pour enfin lancer l'avertissement qu'il essayait en vain de placer depuis plusieurs minutes ; les héros sont en grand danger et doivent au plus vite quitter les lieux avant d'être découverts. Zephyros, tel qu'il se présente, les prend initialement pour des cultistes égarés qui ont enfreint sans le savoir l'interdiction absolu faite aux humains de quitter la basse cour que son neveu Blagothkus, le seigneur de Skyreach Castle, a édictée. Sentant que le vieux géant est inoffensif, les héros prennent le risque de lui révéler leurs véritables intentions de contrecarrer les plans du culte. En réponse, Zephyros fait taire ses inquiétudes et accepte leur proposition de libérer le château des adorateurs de Tiamat. Il leur explique que Blagothkus a conclu cette alliance improbable sous l'influence de sa cousine. Sansuri, la fille de Zephyros, est en effet aussi pleine de rancœur et de jalousie que son père est doux et compassionné. Elle refuse de se plier à l'ordre ancestral d'Annam que le dieu des géants a imposé à ses enfants et ses paroles fielleuses ont réussi, on ne sait comment, à convaincre son cousin qu'il est digne de renverser Hekaton, le roi des géants des tempêtes, pour mener ses semblables vers un ordre nouveau dont il sera le maître incontesté. Pour accomplir ce projet fou il lui faut bien sûr de puissants alliés et Sansuri lui a alors suggéré d'obtenir l'appui de Rezmir et des légendaires grands vers qu'elle peut rallier à sa cause au nom de sa déesse, car qui est mieux à même   d'abattre le règne fantoche d'Hekaton si ce n’est les ennemis héréditaires de l'ancienne Ostoria? 
Les héros se cachent donc dans la grande besace de Zephyros qui les introduit clandestinement dans le grand hall du château au nez et à la barbe des gardes ogres qui flanquent la monumentale porte ornementée de la tour principale. 

Blagothkus

Blagothkus accueille son oncle en le tançant d'une voix tonnante pour son retard à venir prendre place au banquet en cours. Zephyros murmure quelques timides excuses qui lui valent une volée d'insultes acerbes de la part de sa fille. Affublée d'un masque de porcelaine qui lui couvre les yeux, la géante couverte de bijoux sans prix est pendue à l'épaule de son cousin et lui susurre un chapelet de médisances enrobées d'une flagornerie éhontée à laquelle il acquiesce d'un air satisfait. Seul un jeune géant semble attristé par le traitement sévère que reçoit Zephyros. Thullen, le fils de Blagothkus, tend ainsi à son grand-oncle une assiette d'or débordant de victuailles en lui posant une main compatissante sur l'épaule. Le regard peiné qu'il lance à son père semble le déstabiliser un instant, mais aussitôt Sansuri reprend son persifflage en lui caressant la joue et sa figure se durcit à nouveau en une expression de mépris pour le vieillard. Finnlay a bien observé tout l'échange depuis un trou de la besace dans laquelle les héros sont cachés. Il n'a aucun doute que le seigneur des lieux est sous l'emprise d'un charme qu'il s'attelle immédiatement à défaire. A peine sa dissipation de la magie a-t-elle fait effet que ses compagnons se révèlent au grand jour, jetant les géants dans un émoi comparable à celui que l'irruption d'une armée de cafards au milieu de leur festin aurait provoqué. Alors que Cressaro, le puissant sénéchal du château, se jette devant son maître pour le protéger de sa mirifique armure d'argent embossée de complexes motifs végétaux, Tengrim se lance dans une violente diatribe dénonçant la duplicité de Sansuri. Soutenu par l'approbation de Zephyros, le discours semble faire mouche et Blagothkus échappe enfin à l'influence néfaste de sa cousine. Folle de rage, celle-ci fait taire son père en le terrassant d'un terrible éclair magique. Tengrim sort sa hache pour répondre à cette agression mais Blagothkus se méprend sur ses intentions. Il abat son énorme étoile du matin devant lui faisant voler en éclats la table et envoyant bouler le nain sur le sol. Le cri de Thullen au chevet de son grand -oncle à la poitrine encore fumante retient son bras avant le coup suivant. Le géant est d'autant plus décontenancé que son fils semble implorer l'aide des humains qui ont surgi derrière le nain, Finnlay se précipitant pour soigner le vieux géant de sa magie apaisante. Cressaro parvient à tirer son seigneur en arrière pour le mettre à l'abri du combat et Tengrim et Ildur en profitent pour attaquer Sansuri. 

Sansuri

Le nain entame son assaut par un sort de silence qui prive la géante de sa magie, permettant à Ildur de n'avoir à passer que les anneaux d'or de son armure pour pouvoir la blesser. Sansuri lance un cercle de métal acéré sur Tengrim qui le frappe violemment avant de rejoindre la main de sa propriétaire. La concentration du nain est brisée par l'impact et la géante débarrassée de la bulle de silence qui l'entravait en profite aussitôt pour activer ses défenses magiques. Les dagues du ranger se retrouvent déviée de leur trajectoire par un bouclier de force impénétrable tandis que les sorts de Finnlay sont dévorés en plein vol par un essaim de miroitements qui emplit l'air autour de la géante. La riposte de cette dernière est dévastatrice alors qu'un flot d'éclairs frappe les humains présomptueux qui osent la défier. Tengrim se relève alors et entonne le chant de bataille de Clanggedin. Jotunbane frémit d'impatience dans sa main alors qu'il charge. Chacun de ses coups semble plus fantastique que le précédent alors que les protections magiques de Sansuri volent en éclat. Vaincue par la violence de l'assaut, elle interpose en vain son arme que Tengrim lui arrache avant de l'abattre dans un râle victorieux.  
Les héros resserrent leurs rangs alors que les gardes ogres les encerclent mais contre toute attente l'ordre qu'ils reçoivent n'est pas d'en finir avec les aventuriers mais au contraire de mettre Sansuri aux arrêts. 
La géante inconsciente est emmenée, restreinte et bâillonnée par des entraves d'or. Blagothkus est prêt à se montrer magnanime et à oublier l'intrusion des héros dans son palais, à condition que les raisons de leur présence ne rallument pas son courroux. Leurs tentatives pour le convaincre de renoncer à son alliance avec le culte restent sans effet. Le géant n'a que faire des malheurs des royaumes humains qui souffriront de la destruction qu'apporterait la victoire des adorateurs de Tiamat. En revanche les allusions à la perte d'influence de Rezmir au sein du culte semblent l'inquiéter davantage. Les aventuriers s'engouffrent dans cette brèche et brossent un portrait calamiteux de la wyrmspeaker, racontant avec quelle facilité ils l'ont vaincue et discréditant complètement sa capacité à rallier les grands dragons à la cause de Blagothkus. La déception du géant en apprenant qu'il a été berné n'a d'égale que sa colère. Il ne veut plus entendre parler du culte, des humains ou des dragons, et son amertume ne sera adoucie que quand tous auront été chassés de sa forteresse. Il charge donc Cressaro d'organiser l'expulsion des cultistes et les héros sont libres de se joindre à l'entreprise dont la garnison ogre se chargera. Thullen remercie chaleureusement les héros d'avoir mis fin aux manigances de Sansuri. Il va désormais essayer d'apaiser la fureur de son père mais si à l'avenir les aventuriers ont besoin de son aide ils n'auront qu'à souffler dans la conche qu'il leur confie pour que les géants répondent à l’appel.  

Après quelques heures de repos, les aventuriers sont prêts à reprendre le combat, mais cette fois-ci c'est entourés d'une forte troupe d'ogres qu'ils attendent que la grande herse qui les séparent de leurs nouveaux adversaires se relève. 

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