Une aventure de Donjons & Dragons de niveau 12
Avec
Kri Shanu, Le moine qui
neutralise toujours l’adversaire le plus dangereux
Ildur Main d’Airain, Le ranger qui découvre qu’on le connait sous un autre nom
Arias Letho Mortegueule, Le chasseur de mage qui se mue en as de la cambriole
Faerdhallarlasar
"Rka" Muulkennirrhialiandeth, le drakéide qui ne supporte pas de
laisser un innocent se faire maltraiter
Les bruits de la fête commencent à leur parvenir depuis le grand hall. Le brouhaha de la musique, des rires et des verres qui s’entrechoquent est interrompu à intervalle régulier par un tocsin qui annonce l’arrivée d’un invité prestigieux dont la présence est accueillie par une salve plus ou moins nourrie de vivats selon le prestige attaché au nom du nouveau venu. Le rythme auquel les mets doivent sortir des cuisines s’accélère bientôt suffisamment pour que les serviteurs désertent le cellier pour se concentrer sur le service des convives de plus en plus nombreux qui s’abattent sur le somptueux buffet comme une nuée de sauterelles. Les héros en profitent pour s‘extirper des tonneaux dans lesquels ils étaient cachés. Tandis que ses compagnons font de leur mieux pour défroisser les tenues chamarrées qu’ils ont endossées pour se fondre dans la masse des invités, Ildur procède à une reconnaissance rapide des larges caves au fond desquelles ils se trouvent. Non loin de l’escalier qui mène aux parties communes, il remarque qu’une trentaine de pauvres gens attendent timidement devant une grande table montée sur tréteaux qu’on leur serve le repas dont les propriétaires des lieux ont promis de leur faire la charité. Le ranger se plaque dans l’ombre alors que d’autres malheureux arrivent encore, menés par un garde de la maison Gant dont le visage lui est étrangement familier. Il est sûr d’avoir déjà rencontré cet homme mais il lui est impossible de se souvenir dans quelles circonstances. Il en est si troublé qu’il sursaute quand Arias apparaît à ses côtés pour lui demander si la voie est libre. Le chasseur de mage n’attend pas sa réponse pour le dépasser et s’engouffrer dans l’escalier désormais vide et rejoindre la fête qui bat son plein.
Une foule bigarrée de courtisans se presse partout dans la gigantesque
demeure sous la diligente surveillance des nombreux gardes de la maison. Après
s’être assuré qu’Albrecht était englué dans un essaim de flagorneurs à l’autre
bout du parc, Arias déroule discrètement un parchemin dont la magie lui permet
de prendre l’apparence exacte de l’aristocrate. Ses talents de comédiens hors
pair rendent la tromperie encore plus indécelable et il se dirige donc sans
hésiter vers les appartements privés du vieil homme. Les gardes qui interdisent
l’accès à l’étage sont surpris de voir leur maître se présenter devant eux mais
l’humeur ombrageuse que l’imposteur affiche ostensiblement suffit à les
dissuader de lui faire part de leur perplexité. Arias les écarte d’un air agacé
avant de monter l’escalier jusqu’à la porte hermétique dont seul Albrecht
possède la clé. Malgré ses talents de crocheteur, la serrure s’avère plus
difficile que prévu à forcer. Le chasseur de mage doit simuler une vue troublée
par un excès de vin pour maîtriser les soupçons des hommes de faction
suffisamment longtemps pour enfin parvenir à ouvrir la porte. La chambre qu’il
découvre derrière est d’un luxe qu’il a rarement contemplé. Les draps sont
faits des étoffes les plus rares, les meubles sont sculptés dans les bois les
plus exotiques et partout brillent les chandeliers d’or et d’argent. Le petit bureau attenant renferme les documents
les plus confidentiels du priakos de Gant. Les rapports de caravaniers et les
livres comptables font état d’une prospérité remarquable en ces temps troublés,
les convois de marchandises qui transitent d’une manière ou d’une autre entre
les mains des Gant se trouvant comme par hasard absolument épargné par les
attaques qui rendent les routes impraticables pour ses concurrents contraints d’investir des sommes si conséquentes pour
assurer la protection de leurs biens qu’il n’y a guère plus que le Zhentarim
qui ose encore se lancer dans l’aventure. Les documents vraiment compromettant,
ceux qui pourraient prouver que toute cette manne n’est due qu’à la complicité
du culte du dragon, sont en revanche bien à l’abri du formidable coffre
lantanais qui trône au fond de la pièce. Les prêtres de Gond qui l’ont façonné
l’ont doté d’une serrure incroyablement complexe et ses parois d’adamantine
sont impossibles à percer, sans parler des multiples couches de glyphes de
garde qui achèvent de rendre le coffre inviolable. Arias renonce à tenter de le
forcer et se contente d’empocher quelques documents qui atteste de l’étonnante
bonne fortune du priakos avant de retourner se fondre dans la foule. Son retour
passe d’autant plus inaperçu qu’à ce moment les tocsins sonnent à tout rompre
pour annoncer l’arrivée de l’invité d’honneur de la soirée, le seigneur
découvert d’Eauprofonde lui-même, Lord Neverember. Son grand ami enfin à ses
côtés, Albrecht convoque l’assistance devant l’estrade installée dans le parc
pour y délivrer son discours du soir. Après avoir copieusement complimenté
Neverember, il annonce que la générosité de ses hôtes permettra de nourrir des
centaines de miséreux dont un échantillon trié sur le volet pour être pathétiques
sont pour autant être repoussants est amené à défiler devant l’assistance ravie
de se racheter une conscience à si peu de frais. Albrecht descend enfin de la
scène sous une salve nourrie d’applaudissements avant d’aller donner l’accolade
à Neverember et de se retrouver enseveli sous une marée de courtisans désespérément
en quête de la moindre des faveurs des deux puissants seigneurs. Arias profite
du mouvement de foule pour emprunter l’apparence de Thurstwell et entrainer
Ildur à sa suite vers la dépendance où les fils Gant ont leurs chambres. Le garde
en faction devant la porte s’écarte respectueusement devant eux, mais alors
qu’Arias le dépasse sans lui accorder le moindre regard, l’homme adresse dans
son dos un signe de menton complice à Ildur comme s’il saluait un vieux
camarade. La fouille de la dépendance ne révèlera rien de plus, mais Arias en
profitera pour subtiliser la réserve de Ziran de Thurstwell en espérant que le
manque finira par le conduire à se trahir.
Pendant ce temps au sous-sol, les miséreux sont enfin
autorisés à entamer leur repas. Mais la soupe qu’ils avalent goulûment a un
effet bien étrange sur eux. Leurs yeux deviennent encore plus vitreux qu’à
l’accoutumée et les balancements de leurs corps las se synchronisent peu à peu comme
ceux d’un bon troupeau. Rka ne peut en supporter plus et il décide d’intervenir
pour tenter de soustraire les malheureux à l’emprise du culte. L’homme en
charge de la distribution s’interpose mais le drakéide l’arrête de son autorité
divine pour lui suggérer de plutôt se joindre à ses victimes pour déguster un
bol de la crémeuse décoction qu’il leur offre. Quand Arias et Ildur reviennent,
le garde est déjà profondément sous l’emprise de la drogue qui le rend
particulièrement réceptif aux questions des héros. Il leur confirme que les
centaines de pauvres gens qui seront amenés au cours de la soirée seront tous guidés
à travers Montprofond jusqu’à Skullport où des navires les attendent pour les
emporter en esclavage bien au sud vers le Calimshan où Galvan, le wyrmspeaker
bleu, doit les prendre en charge. Son récit s’interrompt abruptement quand il
reconnait Ildur.
« Davren », lui dit-il, « que fais-tu
ici ? ne devais-tu pas être stationné dans la Grande forêt ? quelque
chose ne va pas avec Neronvain ? ».
Le ranger est aussi consterné par les propos de l’homme que
ses compagnons, mais ces paroles resteront mystérieuses car l’esprit du garde
s’embrouille de plus en plus et ses réponses se font bientôt totalement
incohérentes.
Maintenant qu’ils ont découvert les plans du culte, les héros se décident à passer à l’action. Ils fendent la foule des miséreux hébétés pour s’engouffrer dans le passage secret à travers lequel les malheureux seront poussés vers leur triste destin. Le large escalier de pierre qui descend vers les souterrains cachés est nimbé de curieuses lumières colorées. Approchant avec la plus extrême discrétion, ils découvrent qu’une grande chapelle dédiée à Tiamat se cache ainsi sous le manoir.
Des statues des cinq familles de dragons chromatiques se dressent sous les arches qui ornent les murs, chacune irradiant d’une lumière correspondant à la couleur du dragon qu’elle représente. Au centre se dresse un autel au-dessus duquel trône la figure de la déesse elle-même. Sous son ombre terrifiante, un dragonclaw de haut rang palabre à voix basse avec un mercenaire elfe noir à l’air cruel. Une douzaine d’autres cultistes masqués patientent aussi entre les bancs alignés de part et d’autre de l’allée centrale. Profitant de l’effet de surprise, les héros lancent une attaque dévastatrice sur les esclavagistes. Une puissante boule de feu de Rka balaie presque tous les dragonclaws tandis que les tirs croisés des flèches d’Ildur et des éclairs d’Arias abattent leur chef dans la foulée. Seul l’elfe noir réussit à échapper à l’assaut initial en se servant de ses complices comme boucliers humains mais il est intercepté par Kri dont les coups l’étourdissent avant qu’il ne puisse fuir. Ses instincts de bretteur sont cependant si aiguisés que, même chancelant, il parvient encore à esquiver l’une après l’autre les flèches d’Ildur. Les murs se mettent alors à trembler alors qu’un grondement de colère semble sortir des cinq gorges de la statue de Tiamat. Comme en réponse au courroux de leur divinité, les dragons de pierre qui entourent la salle s’animent et se jettent sur les héros. Le bleu et le vert s’attaquent à Kri qui doit délaisser le drow pour se concentrer sur sa propre sauvegarde. Arias attire sur lui le rouge par ses irrésistibles provocations. Ildur se met hors de portée en grimpant lestement vers le plafond grâce à ses chaussons de pattes d’araignée. Le noir et le blanc se désintéressent donc de lui pour reporter leur attention sur Rka et la violence de leur coups à son encontre est décuplée par la haine millénaires qui anime leurs divinités respectives. De son perchoir, le ranger ajuste l’elfe noir alors qu’il s’apprête à rejoindre l’escalier. Cette fois ci son trait fait mouche et le mercenaire s’effondre. Mais il réserve une ultime ruse à celui qui l’a abattu. Alors qu’il bascule vers le sol, sa main se crispe dans un dernier geste autour d’une fiole de cristal. En se brisant elle libère une minuscule créature qui commence à grandir à une vitesse étourdissante. Ses grandes pattes chitineuses se déploient sous un abdomen bulbeux mais là où devrait se trouver les crochets de l’araignée géante se dresse à leur place le torse d’ébène d’un drow au regard fou. Il brandit deux lames crantées en direction d’Ildur avant de lui aussi s’engager à la verticale le long du mur pour engager un combat perpendiculaire à celui qui fait rage entre les débris de la chapelle.
Les
coups des héros semblent ne faire que peu de dégâts aux statues animées. A
l’inverse les griffes des dragons de pierre se font de plus en plus menaçantes
et Rka doit déployer ses ailes de platine pour s’en prémunir. Cette
démonstration de la faveur de Bahamut enrage les créatures de Tiamat qui
s’acharnent toutes sur le paladin, à l’exception du rouge qui reste sous
l’emprise d’Arias. Face au drider, Ildur doit lui aussi faire montre de tout
son talent de combattant mais il finit par trouver l’ouverture qui lui permet
de plonger l’un de ses poignards dans le cœur de l’abomination qui laisse enfin
sa vie de douleur l’abandonner avec un râle de soulagement. Comme le cadavre monstrueux
retombe lourdement au sol, Ildur remarque que celui de l’elfe noir s’est
volatilisé pendant le combat.
Seul à avoir une vue d’ensemble des événements grâce à sa
position en retrait, Arias se rend compte que même s’ils parviennent à venir à
bout des monstres, leur victoire sera vaine si elle n’a pas de témoin. Or du
fond des souterrains où ils se trouvent, le vacarme pourtant assourdissant du
combat n’a aucune chance d’être perçu par qui que ce soit à la surface. Il
manœuvre donc pour attirer la statue du dragon rouge à sa suite alors qu’il
remonte vers la fête en invitant Rka à faire de même avec les autres constructs.
La furieuse procession fait une entrée fracassante au milieu des convives,
provoquant une incroyable panique. Mais les dragons de pierre ne sont pas
seulement accueillis par une foule de courtisans éperdus de terreur, une armée
de gardes du corps aguerris se dresse également face à eux, au premier rang desquels
la garde personnelle de Lord Neverember. Avec un tel renfort à leurs côtés, les
aventuriers renversent facilement le cours de la bataille.
Ils peuvent ainsi exposer au grand jour l’origine des
créatures et révéler à la prestigieuse assemblée les funestes plans de leurs
hôtes. Ceux-ci restent introuvables, ils ont fui avec leurs hommes dès que
l’issue du combat n’a plus fait de doute. Devant ces preuves irréfutables, Lord
Neverember ne peut que se résoudre à désavouer publiquement Albrecht et ses fils.
Il poursuivra avec diligence tous leurs complices jusqu’à ce que la cellule du
culte à Eauprofonde soit totalement démantelée. Mais ces mesures arrivent bien
tard et sa réputation porte maintenant la marque indélébile de sa compromission
avec les adorateurs de Tiamat. Sa brouille avec le duc de Baldur’s Gate apparaît sous un tout nouveau jour et si Eauprofonde elle-même s’est débarrassé
de ses ennemis intérieurs, l’Alliance des Seigneurs sortira sans doute
fragilisée de cette fâcheuse affaire.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire